Le Plaisir ET la Forme

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18.3.18

L'épopée des Grands Jours de Bourgogne

En quête du climax des Climats

Salon itinérant bisannuel, remarquablement organisé par une équipe dédiée soutenue activement par le BIVB et ses partenaires institutionnels, les Grands Jours de Bourgogne offrent à 2500 professionnels du monde entier triés sur le volet, une opportunité incomparable de mieux appréhender in situ la richesse et la diversité exceptionnelle des terroirs bourguignons. En compagnie de l'émérite sommelier (et agent commercial !) AlainSégelle nous avons rayonné durant 5 jours, à partir d'une accueillante chambre d'hôte "gastronomique" beaunoise (la bien nommée Au Raisin de Bourgogne *), sur les 10 lieux accueillant un millier d'exposants. Ces domaines représentaient la plupart des 84 A.O.C. des cinq principales sous-régions viticoles - Chablis et Grand Auxerrois, Côte de Beaune, Mâconnais, Côte Châlonnaise, Côte de Nuits - constellées de 1247 Climats (parcelles spécifiques et "lieux dits") dont 640 classés 1er Cru et une centaine en Grands Crus (1% du volume total de la production moyenne). Les cuvées mises en avant, majoritairement en blanc et rouge plus quelques rosés et effervescents, étaient issues essentiellement de deux millésimes très contrastés : le "solaire / magnifique" 2015 béni par une météo généreuse, et le "compliqué / miraculé" 2016 particulièrement affecté par des gelées tardives et orages de grêle. Nous avons également pu goûter des échantillons du millésime 2017, tout juste mis en bouteille ou tirés sur cuve/fût spécialement pour l'occasion, qui se sont révélés de séduisants "surdoués" associant la finesse des 2014, l'opulence des 2015 et la "tension" des 2016. Malgré un rythme assidu quotidien de 9h à 17h, agrémenté d'une courte mais salutaire pause-buffet, nous avons eu le temps d'apprécier à peine plus de 1800 des quelques 10000 flacons proposés à la dégustation ! Derrière l'apparente uniformité des vins bourguignons, en quasi-totalité mono-cépage (Chardonnay ou Aligoté pour les blancs, Pinot Noir ou Gamay pour les rouges), se cachent d'étonnantes et subtiles variations gustatives liées aux multiples facteurs naturels et humains contribuant à leur élaboration, à la vigne et au chai : structure géologique et pédologique, profil topographique et orientation des parcelles; biodiversité, pratiques culturales, date des vendanges, tri des grappes, techniques de vinification, type et durée d'élevage, assemblage final et mise en bouteille, vieillissement en cave. Ici, chaque morceau de terroir forme avec son vigneron un couple unique et  indissociable dont l'harmonie relationnelle va déterminer la qualité du nectar qui s'épanouira dans nos verres après plusieurs mois ou années de gestation. En soirée, des "off" sous forme de dégustations thématiques furent l'occasion, dans une ambiance conviviale, de transcender les classements viticoles officiels dont la complexité peut désorienter les non-initiés : "Millésimes froids et chauds" animée par la Bourgogne Wine Alliance, composée de 5 "négociants en chambre" promouvant des petits producteurs de haute qualité - "Exception'elles" organisée par Femmes et Vins de Bourgogne , association regroupant une trentaine de vigneronnes soudées et "féminines mais pas féministes" - "Vins du Jura" et sa remarquable palette de vins à forte personnalité (vin jaune, vin de paille...) - "Paulée nocturne" improvisée au Domaine Bernard Millot avec une amicale de "jeunes vignerons passionnés" venus d'horizons variés - "Les Gobeloteurs", groupement hexagonal de "vignerons partageurs" guidés par la recherche de l'excellence. Tous ces hommes et femmes amoureux du terroir, qui nous ont fait découvrir le fruit de leur labeur, ont pour traits de caractère communs l'humilité, le courage et la solidarité face aux fréquents aléas du métier. La sensibilisation des nouvelles générations de viticulteurs, dans le sillage des pionniers du bio et de la biodynamie (Guillot, Giboulot, d'Heilly et Huberdeau, Derain, Trapet, Rateau...), à des approches plus respectueuses de la plante, de l'environnement et de la santé des populations locales autant que de celle des consommateurs, est prometteuse pour l'avenir. Dans le contexte d'un marché global abreuvé par des "vins génériques" sans âme et aux arômes variétaux standardisés, le vignoble de Bourgogne, héritier d'une longue tradition et fier de sa typicité reconnue par l'inscription en 2015 de ses Climats sur la liste du patrimoine mondial de l'UNESCO, a encore de beaux (et grands !) jours devant lui...
* en clin d'œil : "De chez Loiseau on s'envole aussitôt, chez Evelyne et Didier on fait son nid au-Cîteaux"

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